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Édito : Verre brisé et monde réparé

L’édito du rabbin Delphine Horvilleur.

Jour de mariage. Sous le dais nuptial dressé, symbole d’un foyer qui se construit, les fiancés se tiennent côte à côte. Sept bénédictions sont récitées et racontent dans le langage imagé de la liturgie traditionnelle un retour au début de l’Histoire : « Que l’Éternel réjouisse les mariés comme il a réjoui ses créatures au jardin d’Éden… »

Le temps d’une cérémonie nuptiale, nous voilà revenus au paradis pour être témoins de l’union primordiale entre Adam et Ève. Et nous en sommes à nouveau expulsés… par un verre brisé. La cérémonie juive du mariage s’achève toujours dans cette brisure irréparable. Elle est essentielle. Certes, selon nos sages, il s’agit de marquer le souvenir de la destruction du Temple de Jérusalem, un deuil au cœur de la fête, une incursion du passé au milieu des projets d’avenir. Mais le verre brisé dit aussi autre chose. Il est un peu au mariage juif ce que les trois coups sont au théâtre, à ceci près qu’au lieu d’ouvrir la cérémonie, il la scelle. Il est la conscience sonore d’une transition nécessaire. Il marque le passage entre deux temps de nos vies: le mythique et le réel, le sacré et le profane.

Au jardin d’Éden et sous la houppa, le monde est encore entier comme un verre intact.

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