C’est avec une grande tristesse que la rédaction de Tenou’a a appris le décès de David Biale, le 28 juillet 2024. Historien spécialiste de l’histoire culturelle et intellectuelle du judaïsme, il a été titulaire de la chaire en Histoire juive de l’Université de Californie-Davis. En 2011, il a remporté le Prix Davis pour l’enseignement et de la recherche universitaire. Il est l’auteur d’une dizaine d’ouvrages dont Pouvoir et violence dans l’histoire juive, paru en français en 2005 aux éditions de l’Éclat et Éros Juif, paru en 1998 chez Actes Sud. Le rabbin Delphine Horvilleur lui rend hommage ici et nous vous proposons de relire un entretien et un article de David Biale parus dans Tenou’a ces dernières années.
Ma conversation avec David Biale a commencé en 2015. Très précisément au moment des attentats de janvier dans notre pays. Dans ma boîte email ont soudain surgi de bouleversants messages de soutien venus de la lointaine Californie, et s’y exprimaient une solidarité particulière avec la France.
Je connaissais évidemment le nom de leur auteur, une référence que j’avais si souvent croisé lors de mes études rabbiniques. J’avais lu tant et tant de ses articles et ses livres, j’étais très impressionnée par la puissance intellectuelle de ce grand scholar, spécialiste d’histoire juive, de hassidisme, de mystique, de sionisme et de tant d’autres choses encore.
Nous avons débuté un échange et il m’a annoncé qu’avec sa femme Rachel, ils viendraient passer un moment à Paris pour affirmer plus fortement encore leur soutien à la France qu’ils aimaient tant. J’ai eu la chance de les accueillir tous les deux à la synagogue et de poursuivre ce dialogue, puis de l’inviter souvent à écrire dans la revue Tenou’a.
Je regrette de ne pas avoir eu le temps de lui exprimer d’avantage mon immense reconnaissance. David Biale nous quitte à un moment où ses écrits et ses thèmes de prédilection sont sans doute, plus que jamais, pertinents: il n’a cessé d’interroger la forme politique du judaïsme, la question de la souveraineté, de la violence de toute démarche politique… il a pensé l’apport unique du judaïsme à la construction des sociétés modernes laïques, et il a réfléchi aussi dans son célèbre Eros and the Jews, au dialogue entre libido et pensée juive… ce qui revient à se demander: comment se relève-t-on de nos deuils et de nos douleurs?..
La diversité de ses recherches et de ses champs d’expertises est époustouflante. Et je veux croire que par-delà sa vie, il saura encore et encore nous inviter à interroger nos héritages, à penser la force de nos histoires, avec ou sans majuscules.
J’adresse toutes mes condoléances à sa famille et ses proches. que sa mémoire soit une bénédiction.
Rabbin Delphine Horvilleur