J’aime bien Noël, très honnêtement. J’aime la musique de Noël, ses lumières, ses décorations… Je vais souvent chez un ami qui a un très beau sapin de Noël. Je n’en achète jamais. Qui voudrait shlepper [se trimballer] un arbre depuis la forêt, ou même depuis une boutique, l’attacher au toit de sa voiture et l’amener jusqu’à la maison, couvert de shmutz [saletés]? Je n’ai pas besoin de ça ; je me fiche de savoir si un arbre est beau ou non. Mais voici pourquoi je suis si heureux que, Dieu merci, les sapins de Noël ne fassent pas partie de nos traditions et de nos fêtes! Si tel était le cas, il existerait à coup sûr à un millier de règles et de lois encadrant leur usage !
Il y aurait un Traité talmudique, Masekhet haEtz [“Le sacrifice de l’arbre”], et il y aurait d’interminables chapitres dans lesquels des rabbins se demanderaient : comment on shekht [abattre rituellement] l’arbre ? Où on le shekht ? Quand on le shekht ? S’il présente une imperfection, peut-on seulement l’abattre ?
À quelle espèce doit-il appartenir ? Eh bien, il ne peut pas s’agir d’un arbre fruitier car l’abattre reviendrait à détruire de la nourriture en devenir. Mais il doit avoir de la sève, impérativement! Tu dois pouvoir y déceler au moins une goutte de sève, qui montre qu’il s’agit d’un arbre encore vivant. Tu ne peux pas abattre un sapin déjà mort! Tu dois le tuer toi-même de la façon la plus humaine possible. Un goy peut-il couper l’arbre à ta place ? Est-ce mevushal ? non-mevushal [kasherout du vin] ? Makhloket [dispute talmudique] en vue, vive controverse. Quand tu ramènes l’arbre à la maison, dois-tu prononcer une brakha [bénédiction] avant de franchir le seuil de la porte ? Hillel considère qu’il est trop tard, une fois que le pied gauche se trouve à l’intérieur de la maison. Shammaï lui répond qu’on ne peut plus prononcer la brakha dès lors que les deux pieds se trouvent à l’intérieur du foyer. Et tous deux s’accordent sur le fait qu’il est peut-être trop tard pour faire la brakha en entrant mais qu’il n’est jamais trop tard pour prononcer la brakha sur l’installation de l’arbre. Et, précisément, lorsque tu dresses le sapin, tu devrais garder en tête tous les arbres coupés qui ont été tués pour produire du papier et des meubles !
Lorsque tu décores le sapin – et ce qui suit est capital – tu dois installer les lumières de droite à gauche mais les allumer de gauche à droite. Et si – Dieu préserve ! – l’une des ampoules ne fonctionne plus, la guirlande tout entière est inutilisable. Chaque ampoule représente Kaal Israel [le peuple d’Israël tout entier]. Et si l’une de nos lumières est éteinte, nous sommes tous éteints! Certains de nos sages considèrent que tant qu’il demeure une faible lumière, si la lumière qui se dégage de l’ampoule est à peine perceptible – si vous lisez Rachi, il considère que le terme “faible” admet une lueur vacillante – s’il y reste une lueur vacillante, il y a toujours de la lumière dans cette lueur. Et une fois le sapin illuminé, tu ne peux retirer aucun bénéfice de sa lumière. Si tu souhaites lire, tu dois placer une lampe à ses côtés. Si elle s’éteint, jette le livre et fuis hors la pièce!
Ne retire pas plus de bénéfice de son odeur! Bouche-toi le nez et respire par la bouche. Et, Has veShalom [à Dieu ne plaise], si une branche cède, le sapin ne vaut plus rien! Mais garde-toi de le jeter : tu dois le débiter et en conserver les branchages pour le skhakh [le toit] de la soukka [cabane] de l’an prochain…
Ce sketch a été joué par Elon Gold lors d’une session de Stand with us à New York et est reproduit ici avec l’aimable autorisation de son auteur. À retrouver sur https://is.gd/elongold
Traduit par Sarah Rozenblum et Antoine Strobel-Dahan
Article publié dans le numéro 166 de Tenou’a, décembre 2016