Mercredi 7 février, au cours d’un hommage national dans la Cour d’honneur des Invalides, Emmanuel Macron saluera la mémoire des victimes franco-israéliennes du Hamas. Trois français sont toujours considérés comme otages ou portés disparus : Ofer Kalderon, Ohad Yahalomi et Orion Hernandez-Radoux.
Pour Tenou’a, YISHAI DAN, oncle d’Ofer Kalderon, dont les enfants, Erez et Sahar ont été libérés fin novembre dans le cadre de l’accord de trêve avec le mouvement islamiste palestinien, accepte de se livrer.
En quoi cet hommage a-t-il du sens et pourquoi est-il important pour vous?
Je suis sans nouvelles d’Ofer depuis 124 jours. Mon cœur est meurtri par la mort de ma belle-sœur et de ma petite-nièce Noya Dan. Depuis des semaines, je mets tout en œuvre avec acharnement pour sa libération. Cette cérémonie revêt une grande importance pour nous, déjà parce que c’est la première dans le monde et aussi parce que, pour une fois, la lumière est faite sur ceux qui souffrent et endurent des épreuves, sans qu’ils soient pour autant des soldats. Là où la France choisit de rendre hommage et de saluer la mémoire des victimes, les responsables israéliens n’ont entrepris aucune démarche officielle en ce sens. La priorité ne semble pas être accordée aux otages. Pour être franc avec vous, je trouve plus de soutien ici que je n’en ai ressenti en Israël.
Comment ressentez-vous le soutien exprimé par la France depuis le début du conflit? Trouvez-vous justifié que l’hommage aux victimes françaises du 7 octobre soit rendu si tard?
Le soutien français est total. Emmanuel Macron est venu nous rendre visite, ainsi que le nouveau ministre des Affaires étrangères et sa prédécesseure. Ils sont venus nous écouter. Vous savez, la cérémonie sera simultanément retransmise pour le public présent sur la place des Otages à Tel Aviv. C’est une fierté d’être français. Je ne crois pas que l’hommage arrive trop tard étant donné qu’Ofer est encore entre les mains des terroristes. Plus les jours passent, plus je perds confiance en la possibilité d’une action concrète. Des doutes me traversent. Je me questionne quant à l’efficacité de nos efforts. Je renouvellerai ma foi le jour où je retrouverai Ofer. Nous sommes là pour eux, sans distinction entre le jour et la nuit. L’initiative du Président Emmanuel Macron, en rendant cet hommage, est un acte de courage. La France a une histoire étendue de réussite dans le sauvetage d’otages et est même disposée à payer pour leur libération, contrairement aux Américains qui refusent de céder au chantage et de négocier avec les terroristes.
Cette cérémonie sera placée “sous le signe de la lutte contre l’antisémitisme”. Est-ce adapté à cet événement?
Je ne crois pas que ce soit la question. Le Hamas n’œuvre pas exclusivement contre les Juifs, mais plutôt contre l’ensemble du monde. Les terroristes s’opposent à tout ce qui diffère d’eux-mêmes et prennent des mesures hostiles à l’encontre de tout ce qui ne fait pas partie de leur vision.
Que pensez-vous de la présence des représentants de La France Insoumise à l’hommage? La considérez-vous comme un atteinte à la mémoire des victimes?
À mon avis, leur présence est inappropriée. Bien que je respecte la décision du Président de la République de les autoriser à venir, leur présence est regrettable. Nous ne pouvons pas influencer cette décision car c’est une question de politique intérieure française. Cependant, il est troublant de constater qu’ils ne craignent pas de propager ouvertement des mensonges.
Pensez-vous que de tels moments de solidarité nationale peuvent contribuer à la recherche d’une coexistence pacifique d’un État palestinien et d’Israël?
Nous devons œuvrer pour la paix. C’est la seule solution possible et nécessaire. Je souhaite profondément la paix avec les Palestiniens, le Liban et même la Syrie ! Cependant, je rejette l’idée de pacification avec ceux qui veulent égorger l’humanité.
En tant que familles d’otages, de quelles informations disposez-vous au moment où nous parlons sur les négociations qui sont en cours pour obtenir leur libération?
Nous sommes complètement dans le noir, on ne sait rien. Personne ne possède la moindre indication, et ce mutisme des autorités israéliennes ne correspond en rien à la normale. Pensez à ce que cela signifie de vivre pendant des mois sans aucunes nouvelles des êtres qui vous sont chers. Nous sommes dans l’incertitude totale quant à leur statut vital, s’ils souffrent de la faim ou de la soif, s’ils sont exposés au froid ou à la chaleur. On ignore s’ils dorment, s’ils reçoivent des soins médicaux, et si les médicaments leur parviennent. Nous sommes particulièrement préoccupés par ce dernier point. Si seulement nous avions la possibilité de retrouver nos proches à Gaza, nous n’hésiterions pas un instant. Malheureusement, ce n’est pas aussi simple. Ceux qui privilégient la neutralisation du Hamas au détriment de la libération des otages semblent mal orienter leurs priorités.
Propos recueillis par Lara Tchekov, 06/02/2024