First éditions, collection « La vie en bulles », 29 septembre, 22,95 €
C’est l’histoire d’un téléphone qui sonne dans un PMU, un soir de novembre, un soir maudit où tout bascule. C’est l’histoire de trois filles qui se retrouvent sous le même toit, sans se connaître, effarées par le monde au-dehors.
Il y a Ava, petite-fille d’un enfant caché à la campagne en 43, il y a Salomeh, une Iranienne de Brest dont la grand-mère disait en 1979 : « La France me prend mes enfants et me rend Khomeini », il y a Leyla, fille de Casablanca venue faire ses études en France mais qui ne veut plus « collectionner les cartes de séjour ».
Trois jeunes femmes de leur temps se retrouvant coincées pour la nuit par la force des armes et du fanatisme dans l’appartement parisien du grand-père juif farouchement athée. Trois jeunes femmes qui ne savent pas si cette parenthèse est le moment de prier ou de ne surtout pas le faire, si elles sont françaises bien françaises ou si elles sont des ailleurs les unes aux autres. Trois jeunes femmes qui vont devoir apprendre à s’écouter pour affronter ensemble la peur et la tristesse.
Ce roman graphique est le fruit du travail engagé de quatre jeunes femmes qu’à Tenou’a nous aimons beaucoup : notre bédéiste favorite, Odélia Kammoun, accompagnée au scénario de Kenza Aloui et Inès Weill-Rochant ainsi que de Saena Delacroix-Sadighiyan qui porte également avec brio le qalam du calligraphe.
Par un procédé diablement futé, les quatre autrices nous rendent témoins involontaires de ce qui se joue cette nuit-là, des cris et des rires, des pleurs et des peurs. Le trait d’Odélia est fin et tendre, et elle montre ici l’immense tessiture de ses talents de dessinatrice. La calligraphie de Saena apporte une profondeur parfois vertigineuse et le scénario, riche et intelligent, se nourrit d’astuces et d’humour pour entendre sans être intrusif.
Un premier roman graphique particulièrement réussi à lire dès le 29 septembre.