
M

Thématiques

Newsletter

Chaque semaine, recevez les derniÚres actualités de Tenoua

À propos

Qui sommes-nous

L'équipe

Les partenaires

Contact

Archives

Informations

Mentions légales

YOM KIP‐​KIP‐​KIPPOUR ou la fĂȘte du bĂ©gaiement
Publié le 1 janvier 1970

8 min de lecture

Sermon du Rabbin Delphine Horvilleur - Yom Kippour 5777

Selon la tradition juive, MoĂŻse bĂ©gayait. Etrange infirmitĂ© que celle‐​lĂ  pour un leader choisi par Dieu pour dialoguer avec son peuple.

Toujours est‐​il que de trĂšs nombreuses histoires juives tournent ce dĂ©tail en dĂ©rision et mettent en scĂšne cette infirmitĂ©. La plus cĂ©lĂšbre blague, vous la connaissez sans doute, raconte que dans le dĂ©sert, les HĂ©breux demandent Ă  MoĂŻse vers quel pays il les emmĂšne et quelle est donc cette terre promise oĂč coulent le lait et le miel. MoĂŻse leur dit alors en indiquant une direction : « Ca_​Ca_​Ca_​Can
 ». Les HĂ©breux se mettent immĂ©diatement en route vers Canaan, mais lorsqu’ils aperçoivent enfin la terre et son environnement plutĂŽt hostiles, ils disent Ă  MoĂŻse : « Est‐​ce donc cela que tu appelles une terre oĂč coulent le lait et le miel ? Â». MoĂŻse leur rĂ©pond : « Je n’ai pas dit Can_​Can_​Canaan, j’ai dit Can_Can_Canada ! Â».

MoĂŻse n’est pas le seul hĂ©ros biblique Ă  souffrir d’un handicap. Isaac Ă©tait aveugle. Jacob boitait, les matriarches Ă©taient stĂ©riles
 Mais il faut bien avouer que le bĂ©gaiement de MoĂŻse a de quoi surprendre davantage. Pourquoi cet homme Ă  la parole entravĂ©e devait‐​il ĂȘtre notre porte‐​parole ? J’ai dĂ©cidĂ© ce soir de rĂ©flĂ©chir avec vous au sens de cette altĂ©ration du langage. Que signifie exactement bĂ©gayer selon la tradition ?

Yom Kippour, placé sous le signe de la répétition, génératrice de changements

Il est essentiel d’en parler aujourd’hui, plus que n’importe quel autre jour de l’annĂ©e, parce que si vous ouvrez le livre que vous avez entre les mains, si vous observez la liturgie de Yom Kippour, l’ensemble des priĂšres que nous nous apprĂȘtons Ă  Ă©noncer pendant les vingt‐​cinq prochaines heures, vous serez bien forcĂ©s d’admettre une chose : nous allons beaucoup, beaucoup, beaucoup bĂ©gayer. Plus exactement, nous allons nous rĂ©pĂ©ter encore et encore, dire les mĂȘmes phrases, rĂ©itĂ©rĂ©es comme des mantras rĂ©pĂ©titifs, des mots tels que Anenou avinou anenou, anenou borenou anenou, anenou goalenou anenou. Ou encore dire, presque Ă  la maniĂšre d’un disque rayĂ©, Al het shehatanou, al het shehatanou, al het shehatanou
 « Voici nos pĂȘchĂ©s, nos pĂȘchĂ©s, nos pĂȘchĂ©s. Dieu rĂ©ponds‐​nous, rĂ©ponds‐​nous, rĂ©ponds‐nous ».

Yom kippour est incontestablement placĂ© sous le signe de la rĂ©pĂ©tition, de la rĂ©itĂ©ration constante. Pourquoi cela ? Parce que selon nos sages et aussi surprenant que cela puisse paraĂźtre : rĂ©pĂ©ter n’est jamais reproduire. RĂ©pĂ©ter est au contraire toujours la clĂ© d’une non-reproduction Ă  l’identique.

La meilleure illustration de ce principe paradoxal est la petite phrase que l’on se souhaite tous depuis des jours et des jours. Nous nous disons encore et encore shana tova, expression que l’on traduit par « bonne annĂ©e Â» mais shana est un mot qui en hĂ©breu ne signifie pas uniquement « annĂ©e Â», mais dont la racine se dĂ©cline de deux autres maniĂšres : dans les verbes leshanen et leshanot, signifiant littĂ©ralement « rĂ©pĂ©ter Â» et « changer Â». Donc, lorsque je vous dis shana tova ou « bonne annĂ©e Â» dans une seule et mĂȘme expression, je vous dis aussi « bonne rĂ©pĂ©tition Â» et « bon changement Â». La nouvelle annĂ©e, c’est Ă©tymologiquement en hĂ©breu, la rĂ©pĂ©tition d’un temps censĂ© produire du changement.

Formidable, me direz‐​vous, mais comment ce principe se dĂ©cline‐t‐il ?

Laissez‐​moi illustrer mon propos par une plongĂ©e dans l’épisode biblique le plus cĂ©lĂšbre et le plus complexe qui soit. Je veux parler de la Akedat Itshak, la ligature d’Isaac appelĂ©e Ă  tort « sacrifice d’Isaac Â». Cet Ă©pisode est au cƓur des fĂȘtes de Tishri. Nous l’avons lu Ă  Rosh Hashana et nous y faisons constamment rĂ©fĂ©rence pendant la journĂ©e de Yom kippour, jusqu’à la sonnerie du Shofar qui rĂ©sonnera demain soir et qui rappelle directement cet Ă©pisode et le bouc qui a remplacĂ© Isaac sur l’autel du sacrifice.

Si ce rĂ©cit nous obsĂšde et nous dĂ©range tant, c’est que potentiellement, il justifie tous les dĂ©lires fanatiques. Il peut conforter les pires soumissions Ă  des projets religieux violents et sanguinaires, puisqu’il suggĂšre a priori qu’un homme peut mener un jour son fils Ă  la mort, sacrifier ce qu’il aime, simplement parce qu’il croit que son Dieu le lui a demandĂ©. Est‐​ce vraiment ce Dieu lĂ  que nous prions ? Attend-il vraiment de nous une obĂ©issance aveugle Ă  une injonction meurtriĂšre ?

Pour le comprendre, je suggĂšre qu’il nous faut Ă©couter attentivement les rĂ©pĂ©titions du texte et plus spĂ©cifiquement les moments oĂč, dans cet Ă©pisode biblique, le texte bĂ©gaye. En voici la preuve, dans une lecture plus attentive du chapitre 22 de la GenĂšse.

Ś•Ö·Ś™Ö°Ś”ÖŽŚ™ ŚÖ·Ś—Ö·Śš Ś”Ö·Ś“Ö°ÖŒŚ‘ÖžŚšÖŽŚ™Ś Ś”ÖžŚÖ”ŚœÖ¶ÖŒŚ” Ś•Ö°Ś”ÖžŚÖ±ŚœŚ”ÖŽÖčŚ™Ś Ś ÖŽŚĄÖžÖŒŚ” ڐֶŚȘ ŚÖ·Ś‘Ö°ŚšÖžŚ”ÖžŚ Ś•Ö·Ś™ÖčÖŒŚŚžÖ¶Śš ŚÖ”ŚœÖžŚ™Ś• ŚÖ·Ś‘Ö°ŚšÖžŚ”ÖžŚ ڕַڙÖčÖŒŚŚžÖ¶Śš Ś”ÖŽŚ Ö”ÖŒŚ ÖŽŚ™

Vayehi ahar hadevarim aele                            Il arriva aprĂšs ces faits

Veaelohim nissa et Avraham                             Que l’Eternel soumit Abraham Ă  un test

Vayomer elav Avraham vayomer hineni       Dieu appelle Abraham qui rĂ©pond me voici

« Il arriva aprĂšs ces faits Â» (aprĂšs quels faits ? mystĂšre ! J’y reviendrai) « que l’Eternel soumit Abraham Ă  un test Â» (selon le Midrash, il s’agit du dernier test d’Abraham, qui a connu dans sa vie bien d’autres Ă©preuves). « Dieu appelle Abraham qui rĂ©pond Hineni Â», « Me voici Â», « je suis lĂ  Â».

Vous connaissez la suite de l’histoire : Dieu demande alors au Patriarche de faire monter Isaac vers le lieu qu’Il lui indiquera. Le terme « faire monter » en hĂ©breu, Ola, peut ĂȘtre interprĂ©tĂ© de deux maniĂšres, comme une Ă©lĂ©vation ou comme l’injonction d’offrir un sacrifice, entiĂšrement consumĂ© par le feu. C’est cela qu’entend Abraham. Alors, il va immĂ©diatement se mettre en route, sans broncher, sans protester, sans s’opposer Ă  ce projet assassin. Lui qui a su en bien des circonstances nĂ©gocier avec Dieu et mĂȘme lui tenir tĂȘte, reste ici silencieux. Abraham se tait et obĂ©it.

Et c’est seulement lorsqu’Isaac est attachĂ© sur l’autel et que le couteau est levĂ© dans les airs, prĂȘt Ă  sacrifier l’enfant d’Abraham, que nous lisons au verset 11 du mĂȘme Ă©pisode :

Ś•Ö·Ś™ÖŽÖŒŚ§Ö°ŚšÖžŚ ŚÖ”ŚœÖžŚ™Ś• ŚžÖ·ŚœÖ°ŚÖ·ŚšÖ° Ś™Ö°Ś”Ś•ÖžŚ” ŚžŚŸ Ś”Ö·Ś©ÖžÖŒŚŚžÖ·Ś™ÖŽŚ Ś•Ö·Ś™ÖčÖŒŚŚžÖ¶Śš ŚÖ·Ś‘Ö°ŚšÖžŚ”ÖžŚ ŚÖ·Ś‘Ö°ŚšÖžŚ”ÖžŚ ڕַڙÖčÖŒŚŚžÖ¶Śš Ś”ÖŽŚ Ö”ÖŒŚ ÖŽŚ™

Vayikra elav Malah Adonai min hashamayim Un envoyĂ© de Dieu appela Abraham du ciel

Voyomer Avraham Avraham voyemer hineni Et dit Abraham Abraham et il rĂ©pond me voici

Un envoyĂ© de Dieu appela Abraham du ciel et dit : « Abraham, Abraham Â» et il rĂ©pond Hineni, « Je suis lĂ  Â», « me voici Â». Vous l’entendez, c’est la mĂȘme rĂ©ponse du patriarche Ă  l’appel divin, Hineni, mais l’appel en question, lui, n’est pas du tout le mĂȘme.

Au dĂ©but de l’épisode, Dieu dit « Abraham Â», ŚÖ·Ś‘Ö°ŚšÖžŚ”ÖžŚ. A la fin de l’épisode, la voix cĂ©leste dit « Abraham Abraham Â», ŚÖ·Ś‘Ö°ŚšÖžŚ”ÖžŚ ŚÖ·Ś‘Ö°ŚšÖžŚ”ÖžŚ. Que s’est-il passĂ© entre ces deux moments du rĂ©cit ? De deux choses l’une, soit Abraham est entre‐​temps devenu sourd (aprĂšs tout, MoĂŻse Ă©tait bien bĂšgue et Jacob boiteux) ; soit, Ă  cet instant du rĂ©cit quelque-chose bĂ©gaye. Et si oui, pourquoi ?

Quels enseignements tirer des bĂ©gaiements du texte  ?

Les commentateurs se passionnent pour cette question. Comment comprendre cette Ă©trange rĂ©pĂ©tition ? Avivah Zornberg, dans son livre La profondeur du murmure (The Murmuring Deep) suggĂšre une interprĂ©tation que j’aimerais maintenant vous livrer, une lecture qui nous oblige Ă  faire un petit dĂ©tour par le passĂ© d’Abraham et plus spĂ©cifiquement par son enfance.

La ligature d’Isaac dĂ©bute par Ś•Ö·Ś™Ö°Ś”ÖŽŚ™ ŚÖ·Ś—Ö·Śš Ś”Ö·Ś“Ö°ÖŒŚ‘ÖžŚšÖŽŚ™Ś Ś”ÖžŚÖ”ŚœÖ¶ÖŒŚ”, Vayehi ahar hadevarim aele : Â« Il arriva aprĂšs ces faits Â». AprĂšs quels faits ? AprĂšs ceux d’un lointain passĂ© dont il nous faut maintenant nous souvenir, comme s’il avait Ă©tĂ© jusque lĂ  refoulĂ©. Avivah Zornberg suggĂšre qu’on ne peut pas comprendre cette derniĂšre Ă©preuve d’Abraham si l’on ne se penche pas sur la toute premiĂšre, telle que le Midrash nous la raconte.

Abraham est l’enfant de Terah, le marchand d’idoles chaldĂ©en. Lorsqu’un jour, Abraham dĂ©truit les idoles de son pĂšre, celui‐​ci dĂ©cide de mener son fils devant un tribunal local pour qu’il soit jugĂ© et condamnĂ©. Le Midrash affirme que ce jour-lĂ , son pĂšre accepta qu’Abraham soit jetĂ© dans une fournaise, expĂ©rience qui aurait dĂ» le consumer intĂ©gralement, mais dont il va miraculeusement sortir indemne. C’est alors, dit le Midrash, Ă  l’issue de ce premier test, qu’Abraham va quitter le pays de son pĂšre pour se mettre en route vers Canaan.

Cet Ă©pisode de la vie du Patriarche va, selon les Sages, le hanter. Abraham est l’enfant qui a failli mourir consumĂ© par le feu, selon la volontĂ© de son pĂšre. Il est en cela un homme hantĂ© par la tentation infanticide dont il a presque Ă©tĂ© victime. Et cet Ă©pisode de la vie d’Abraham, comme refoulĂ© par le texte biblique, nous permet soudain de lire autrement la ligature d’Isaac.

Répéter pour ne pas répéter

Lorsque Dieu dit Ă  Abraham « fais monter ton fils Â», en Ola, Abraham rĂ©pond Hineni, non seulement Ă  Dieu mais Ă  son passĂ©. « Me voici Â» Ă  nouveau face Ă  la mĂȘme histoire, « Me voici Â» face au feu qui consume. Sont ici convoquĂ©s prĂ©cisĂ©ment les fantĂŽmes de ChaldĂ©e, le monde de ses origines oĂč les pĂšres immolent leurs fils. Abraham ne peut pas en cet instant comprendre le mot Ola autrement que comme une injonction au sacrifice. Il s’agit d’un malentendu, qui est le reflet prĂ©cis de son histoire. Et le test de Dieu est prĂ©cisĂ©ment celui‐​lĂ . Une question est posĂ©e Ă  Abraham : que vas–tu faire de cet Ă©pisode de ta vie ? T’en libĂ©rer ou bien le rĂ©pĂ©ter Ă  l’identique ?

Lorsque la voix cĂ©leste surgit Ă  nouveau, elle dit Abraham Abraham. Le Zohar commente ainsi la rĂ©pĂ©tition mystĂ©rieuse du verset : « le premier Abraham que la voix appelle n’est pas le deuxiĂšme Abraham que la voix appelle Â». En d’autres termes, le premier Abraham est l’homme qui va sacrifier son fils comme il fut presque sacrifiĂ© lui mĂȘme. Le deuxiĂšme Abraham n’est plus cet homme. A partir de cet instant, commence une Ăšre nouvelle, un au‐​delĂ  de son traumatisme, un monde oĂč l’on ne sacrifie pas les fils mais oĂč l’on sacrifie le sacrifice humain.

Et c’est parce qu’il a fait face Ă  ce passĂ©, parce que quelque‐​chose s’est rĂ©pĂ©tĂ©e, que son histoire peut ne pas se rĂ©pĂ©ter Ă  l’identique. Le bĂ©gaiement du texte est ici la traduction d’une possibilitĂ© de changement. Il est une voix qui dit : celui que tu Ă©tais peut devenir un autre, ce que tu crois avoir entendu est peut‐​ĂȘtre juste un malentendu. Mais si tu n’affrontes pas ce passĂ© en le faisant un instant bĂ©gayer, tu n’as aucune chance de le savoir.

Le bégaiement donne à entendre une promesse de changement

VoilĂ  pourquoi, chers amis, nous lisons en boucle ce texte pendant les fĂȘtes de Tishri et y faisons continuellement allusion : l’histoire d’Abraham est celle de chacun d’entre nous, que l’on ait ou non Ă©tĂ© un jour jetĂ© dans une fournaise. Pour chacun d’entre nous, il existe la possibilitĂ© d’un changement, la possibilitĂ© d’ĂȘtre Shone, s’il y a un Mishne, de rĂ©pĂ©ter pour ne pas rĂ©pĂ©ter.

Demain soir, presque Ă  la mĂȘme heure, rĂ©sonnera trĂšs prĂ©cisĂ©ment l’histoire de la Akedat Isthak par les voix du Shofar, rappel sonore de cet Ă©pisode. Les sons du Shofar, je vous le disais Ă  Rosh Hashana, sont un rappel de nos brisures et de nos failles intĂ©rieures, mais si vous les Ă©coutez attentivement, vous verrez qu’ils sont prĂ©cisĂ©ment des souffles qui bĂ©gayent.

Tekia est le son assurĂ©, celui qui comme Abraham dit au dĂ©part Hineni, « me voici Â», dĂ©terminĂ© et sans hĂ©sitation, prĂȘt Ă  obĂ©ir Ă  ce que j’ai cru entendre. Surgit Shevarim : la parole est entravĂ©e et comme handicapĂ©e, puis Ă  Teroua, la parole est mutĂ©e en empĂȘchement sĂ©vĂšre, en bĂ©gaiement extrĂȘme. C’est au bout de ces rĂ©pĂ©titions que rĂ©sonne Tekia Guedola. Longue comme un double appel. C’est elle qui entend « Abraham Abraham Â», c’est-Ă -dire qui reconnaĂźt qu’elle est devenue quelqu’un d’autre, un autre homme, une autre femme, capable dorĂ©navant de dire au monde Hineni, me voici, libĂ©rĂ© des entraves d’un passĂ© qui a manquĂ© de faire de moi un coupable.

Tous les bĂ©gaiements sont des promesses de changement. Ils disent : mets–toi en route, Ă  travers le dĂ©sert vers une terre promise qu’elle que soit le nom que tu lui donnes. C’est cela que MoĂŻse notre guide reprĂ©sente, par excellence, dans la tradition. C’est ce que Kippour reprĂ©sente aussi et ce Ă  quoi il nous invite, tout au long de la journĂ©e Ă  venir. A rĂ©pĂ©ter des mots, pour ne pas rĂ©pĂ©ter notre histoire.

Shana tova - کڠڔ Ś˜Ś•Ś‘Ś”
Shana tova - کڠڔ Ś˜Ś•Ś‘Ś”
Shana tova - کڠڔ Ś˜Ś•Ś‘Ś”