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Gaza/​IsraĆ«l : Aimer (vraiment) son prochain, ne plus se taire
PubliƩ le 8 mai 2025

3 min de lecture


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Sur les murs de ma synagogue sont gravĆ©s quelques mots, tirĆ©s d’un des versets les plus cĆ©lĆØbres (et les moins bien compris) de la Bible : Ā« Tu aimeras ton prochain comme toi-mĆŖme Ā».

L’adage, Ć  la maniĆØre d’une Ā« tarte Ć  la crĆØme Ā», Ć©nonce la bonne conscience des religions monothĆ©istes : on s’en gargarise comme pour se convaincre qu’au fond, on ne se veut que du bien. C’est charmant mais on sait que ces mots n’ont jamais empĆŖchĆ© qui que ce soit de recourir Ć  la violence, Ć  l’intolĆ©rance ou au prosĆ©lytisme. L’autre a certes tout notre amour, dĆØs qu’il est notre Ā« prochain Ā» mais, Ć  l’instant où il se fait un peu Ā« lointain Ā», de nos croyances ou nos convictions, mĆ©rite‐​t‐​il encore notre attention ?

Le phĆ©nomĆØne n’est pas propre aux religions. Tendez l’oreille vers tant de discours actuels, polarisĆ©s Ć  l’extrĆŖme. La mĆ©fiance est radicale vis Ć  vis du Ā« salaud Ā» d’en face. Et c’est particuliĆØrement vrai quand il s’agit de dĆ©battre du Proche‐Orient.

TrĆØs vite, chacun dĆ©fend son Ā« prochain Ā» (et uniquement lui !), et la parole se censure… On se tait pour Ć©viter de fournir la moindre munition au Ā« camp Ā» d’en face. Toute autocritique menace l’union sacrĆ©e, se fait traĆ®trise ou, pire, carburant pour un ennemi qui cherche Ć  nous dĆ©truire. Alors Chut… taisons‐​nous plutĆ“t que de faire le jeu d’une quelconque rĆ©cupĆ©ration. Il en va de la sĆ©curitĆ© de nos idĆ©es ou de nos enfants.

Moi‐​mĆŖme, j’ai ressenti souvent cette injonction au silence. J’ai parfois bĆ¢illonnĆ© ma parole, pour Ć©viter qu’elle ne nourrisse les immondices de ceux qui me menacent, ceux qui diabolisent et dĆ©shumanisent un peuple, et s’imaginent aider ainsi un autre. J’ai censurĆ© mes mots face Ć  ceux qui trouvent des excuses Ć  une dĆ©ferlante antisĆ©mite Ā« ici Ā» au nom d’une justice absente Ā« là‐​bas Ā». J’ai entendu dans leur bouche les accords d’une haine ancestrale, la mĆ©lodie de ceux qui sont convaincus d’être du bon cĆ“tĆ© de l’Histoire.

Je me suis tue mais, aujourd’hui, il me semble urgent de reprendre la parole. Je veux parler, au nom de Ā« l’amour du prochain Ā» ou plutĆ“t de ce que ce verset biblique (si mal traduit) en dit vraiment.

Il est Ć©crit : Ā« Si tu sais adresser des reproches Ć  ton prochain Ā» et alors : Ā« tu aimeras ton prochain comme toi-mĆŖme Ā». Cet amour n’a rien d’inconditionnel ou d’aveugle. Il implique au contraire, dans la Bible, d’ouvrir les yeux d’un proche sur ses fautes, et de tendre dans sa direction un miroir pour qu’il s’observe.

C’est donc prĆ©cisĆ©ment par amour d’IsraĆ«l que je parle aujourd’hui. Par la force de ce qui me relie Ć  ce pays qui m’est si proche, et où vivent tant de mes prochains. Par la douleur de le voir s’égarer dans une dĆ©route politique et une faillite morale. Par la tragĆ©die endurĆ©e par les Gazaouis, et le traumatisme de toute une rĆ©gion.

Comme beaucoup d’autres Juifs, je veux dire que mon amour de ce pays n’est pas celui d’une promesse messianique, d’un cadastre de propriĆ©taire ou d’une sanctification de la terre. Il est un rĆŖve de survie pour un peuple que personne n’a su ou voulu protĆ©ger et il est le refus absolu de l’annihilation d’un autre peuple pour le rĆ©aliser. Il est la conviction, dĆ©jĆ  Ć©noncĆ©e par ses fondateurs, que cet Ɖtat doit ĆŖtre Ć  la hauteur d’une histoire ancestrale et, selon les termes de sa dĆ©claration d’IndĆ©pendance, Ā« tendre la main Ā» Ć  tous les pays voisins et Ć  leurs peuples.

Cet amour d’IsraĆ«l consiste aujourd’hui Ć  l’appeler Ć  un sursaut de conscience…
Il consiste Ơ soutenir ceux qui savent que la DƩmocratie est la seule fidƩlitƩ au projet sioniste.
Soutenir ceux qui refusent toute politique suprƩmaciste et raciste qui trahit violemment notre Histoire.
Soutenir ceux qui ouvrent leurs yeux et leurs cœurs Ć  la souffrance terrible des enfants de Gaza.
Soutenir ceux qui savent que seul le retour des otages et la fin des combats sauveront l’âme de cette nation.
Soutenir ceux qui savent que, sans avenir pour le peuple palestinien, il n’y en a aucun pour le peuple israĆ©lien.
Soutenir ceux qui savent qu’on n’apaise aucune douleur, et qu’on ne venge aucun mort, en affamant des innocents ou en condamnant des enfants.

C’est seulement par ce soutien que s’énonce un vĆ©ritable amour du prochain. Pas comme une promesse niaise et inconditionnelle, mais comme une exigence morale qui doit prĆ©server l’humanitĆ© de chacun d’entre nous, et permettre au Ā« prochain humain Ā», c’est-Ć -dire une gĆ©nĆ©ration Ć  naĆ®tre, de connaĆ®tre autre chose que la haine.